mardi 3 novembre 2009

Pokernet industriel III

Suite des épisodes précédents. J'ai fait un peu de NL25, le niveau ne me semble pas insurmontable, et la petite blinde à 2/5 de la grosse blinde est une particularité amusante. Ma bankroll a évolué : des satellites en deux tables pour la grande loterie du dimanche m'ont apporté des T$, et une victoire à un satellite de satellite auquel je ne participerai pas m'a rapporté des W$. Qu'est-ce que j'irais faire aux Philippines, je vous le demande. Bref ma bankroll s'est coupée en trois, et je vais donc redescendre en NL10 côté NLHE 6-max, et en $0.25-$0.50 en Razz 8-max. Les T$ attendent pour l'instant, et j'utilise les W$ dans le système des steps. Objectif 1, 2, 3 et 4, et ticket à $215 pour un tournoi en limit (razz, horse ou omaha hilo). Quand j'aurai accumulé quelques tournois, je vous dirai si les steps sont rentables. Et peut-être utiliserai-je les T$ pour une bankroll de SnG? A suivre...

Vingt Step 1 (W$150) se sont transformés en un Step 4 (dimanche, je $215 Razz!), et j'ai encore deux Step 3 (W$82) et deux Step 2 (W$27) sous le coude. De mon point de vue, le Step 3 porte bien son nom de freeroll, dans la mesure où l'objectif du SnG est d'être dans les cinq derniers (3ème à 5ème reste en Step 3), et de temps en temps l'on obtient le ticket convoité (1er et 2ème). C'est là où d'un point de vue ICM, il y a un vrai effet bulle à six joueurs.

Après le tournoi de razz dimanche : D'un côté j'ai le niveau en Razz (qualité des mains, lecture des adversaires qui jouent les cartes visibles); de l'autre la structure est quand même rapide et un setup au niveau 300-600 est difficilement surmontable (65432 contre 6432A). Dernier coup critique A234 à la cinquième, masqué, toutes les cartes vivantes, pour battre un T87, et hop deux Dames pour louper l'éléphant dans le couloir. On poursuivra sur la route du razz le dimanche soir, le niveau est pitoyable chez les joueurs trop loose, et bien lisible chez les joueurs sérieux. Un bon joueur m'a gratté une mise par un bon check à la sixième, mais comme c'était 100 jetons et que j'avais besoin de comprendre comment il jouait, j'ai timé mais j'ai assez peu hésité pour la vérif'. Après le bust, je suis allé taper en 6-h, j'ai n-tablé en NL10, puis 4-tablé en NL25 qui s'est transformé en 3-tablé en NL50. Sessions courtes mais actives, tendance maniaque. Fait assez rare pour être mentionné, ce soir j'ai trouvé que les tables de PS ramaient un peu. Deux cent cinquante mille joueurs, ça fait quand même un peu de monde.

La BR W$ a été utilisée, j'ai obtenu à partir de W$390, investis dans les steps, deux Step 4 ($215), et j'ai encore un step 3 à jouer. Mon absence de retour sur investissement provient de deux step 3 qui n'ont pas été transformés : deux fois je me retrouve à la turn en 3-way avec top 2 + nut flush draw (et l'une des deux fois avec une ventrale en prime) contre un brelan, forcément. Même si j'arrive à lire la main adverse, les deux fois je dois engager des jetons pour toucher en position 15 ou 18 outs, c'est quand même rare au Hold'em d'avoir autant d'outs contre un brelan. La première fois j'aurais pu le diagnostiquer, j'ai joué un peu vite dans le second niveau; la seconde fois c'est à un niveau intermédiaire où il n'y a déjà plus la cote implicite pour setminer, soupir.

Dimanche, je prends ma revanche au Razz, pour faire mieux que ce maigre 42ème sur 89 joueurs. Seule la TF est payée, ça tombe bien, on joue la gagne.

mercredi 14 octobre 2009

Pokernet industriel II

Un mois, et une bankroll qui est passée de $3 à $300. Progression sage en microstakes, $0.01-$0.02, $0.02-$0.05 et $0.05-$0.10. Puis je ne me suis pas senti la force de continuer en No-Limit Texas Hold'em 6-max (multitable entre 4 et 6 tables superposées), alors j'ai mis en place une nouvelle stratégie pour laisser un peu de temps se passer avant de continuer. Je grinde en Razz, $1-$2. Je le précise tout de suite pour les habitués du no-limit, ici cela ne signifie pas NL200. C'est une partie à $0.10 d'ante, un bring-in à $0.50, et des mises à $1 (deux fois) et à $2 (trois fois). Il y a cinq tours de mise parce que c'est la structure du Seven Card Stud. En gros avec une cave à $40, on est très large puisque cinq mises cappées ($32) ne se voient jamais.

D'excellents avantages au Razz : c'est un jeu technique, où les mises gagnées proviennent de fautes directes des adversaires. Erreur de cote, erreur d'implicites (ce n'est pas du no-limit), erreur de jugement (quand votre adversaire prend vos mises de value pour des bluffs et des mises de bluff pour des mises de value, faute directe), et voilà des jetons qui viennent vers vous. Il y a des inconvénients aussi : le razz est assez facile à maîtriser, quand il n'y a une table qu'avec des forts joueurs en razz, peu d'écarts vont se créer. Et puis il n'y a pas de table de razz ouverte 24/7, même sur le plus grand site du monde. L'un dans l'autre, les avantages prévalent sur les inconvénients.

Tout ce qui dépasse des $300 ($301, $302 etc.) est investi en tournois, sans gestion de bankroll, pour faire un one-shot table finale et prendre un gros palier d'un coup. Les buy-in vont de $5 à $33, les variantes vont de l'Omaha Hi-Lo (toutes formes de mise) au Texas (no-limit); seule contrainte, je choisis des tournois où le champ est réduit. Pour l'instant, j'accumule les bulles (3ème en double shootout $11.70 pour deux tickets à à $215 du tournoi du dimanche, 3ème sur un sat de sat pour un APPT où je n'irai pas, vivent les T$).

C'est ainsi que j'ai eu ce matin $33 qui dépassaient, et je me suis inscrit à la dernière minute à un tournoi de no-limit hold'em, 418 joueurs. En quatre cents donnes, je me suis hissé à la sixième place de ce tournoi, pour un prix de $532.96, soit un gain de $500 (à 4 cents près, belle précision), et ma BR a donc atteint $800 avant la fin de cet article.

Que vais-je en faire? Pas envie pour l'instant de 6-max en NL25. Alors je vais continuer à grinder en Razz, sans monter de limite, et faire d'autres tournois one-shot avec ce qui dépasse des $800. Objectif probable : tous les $75, un petit Step 3 pour un ticket à $215, histoire de profiter des beaux tournois du week-end avant que l'année ne se termine (je pense bien sûr au HORSE et au Omaha HiLo, pas au Millions ni au WarmUp). Et j'aviserai plus tard pour 2010.

lundi 28 septembre 2009

C'est lundi c'est déchetterie

Malgré l'altitude et le sol rocailleux, les plantes autour de ma maison ne cessent de croître, de prendre de l'espace, de se rejoindre et de s'emmêler. Tondre l'herbe, tailler les haies, tailler les massifs et tailler les arbres deviennent vos activités récurrentes, dans la catégorie jardinage à l'huile de coude. Sans oublier le ramassage des feuilles mortes et du petit bois, c'est déjà l'automne, ainsi que le débroussaillage des herbes folles. De mauvaises herbes, dit-on? Non, ce qui gêne vraiment c'est leur capacité à proliférer sans qu'elles nous aient demandé notre avis, ni celui de notre gazon.

Lorsqu'on découvre tout cela, on en vient naturellement à s'équiper d'outils variés, les uns affublés de longs manches, les autres de pinces ou de lames coupantes, sans oublier d'indispensables paires de gants. Puis quelques outils motorisés viennent compléter votre arsenal : une tondeuse à gazon et un taille-haie seront parmi les premiers outils qui vous donneront un vrai coup de pouce, tant la tâche sans eux serait harassante, longue et parfois fastidieuse. Un aspirateur/souffleur peut également avoir son utilité, mais finalement il n'y a que la fonction souffleur qui soit techniquement au point, j'ai renoncé à la fonction d'aspiration pour reprendre un bon râteau pour les feuilles mortes.

C'est ainsi que vous passez la matinée dans le jardin, tond tond, coupe coupe, taille taille, et que, ces tâches accomplies, vous vous redressez un instant pour contempler votre travail, tout en épongeant votre sueur au front d'un revers de gant. Et c'est là que vous découvrez votre vrai problème. Vous avez rempli une poubelle grand format d'herbe coupée, les tas de feuilles ratissées jouxtent les branches coupées de thuyas qui jonchent le sol au pied de la haie, et plusieurs grosses branches d'arbres et tout leur feuillage sont alignées de l'autre côté de la maison, attendant d'être élaguées et séparées entre l'abri bois pour les branches et un volumineux tas de branchages, de feuilles et de fruits encore attachés pour le reste. Et cela représente un volume monumental qu'il va vous falloir faire disparaître.

Dans les premiers temps, j'ai eu recours à une méthode primaire, mais efficace : enlever les sièges et les accessoires de l'arrière de la voiture, y installer horizontalement les deux grandes poubelles - car en plus de l'herbe coupée dans l'une, vous avez mis dans l'autre les feuilles mortes - aux couvercles pivotants verrouillés par du gros scotch marron, que vous avez conservé entre autres reliques de votre déménagement. Vous remerciez vous-ne-savez-qui que ces poubelles aient des roulettes, et surtout que le fond du coffre soit à la hauteur de l'ouverture, ce qui vous permet d'utiliser habilement l'effet de levier pour y hisser chaque poubelle sans les porter complètement. Premier voyage à la déchetterie. Puis un second voyage à la déchetterie avec les branchages dont vous avez par la suite empli le coffre. Laver les poubelles, aspirer les débris dans le coffre de la voiture, et en saison vous savez qu'il ne se passera pas bien longtemps avant que vous n'ayez à recommencer.

Parmi les options disponibles pour améliorer le processus, il y avait en vrac : installer une mini-déchetterie dans le jardin - un pourrissoir, un compost, une grange, etc.-, faire l'acquisition d'une remorque ou d'une fourgonnette pour arrêter de salir la moitié de la voiture, faire entretenir le jardin par des professionnels apportant outils, main d'oeuvre et moyens de transport. Je vous passe les options triviales à la sauce je m'en lave les mains, telles que laisser le jardin à l'abandon, ainsi que l'évidente retourner habiter en ville, au moins c'est le syndic qui traîne les problèmes de copropriété.

J'ai donc fait l'acquisition d'un outil motorisé, catégorie coupe-branches, broyeur, la dénomination n'est pas claire puisque le jargon international appelle shredder cette machine. Shred c'est un petit bout de truc, coupé, découpé, déchiré, broyé, qui peut prendre la forme d'une frange s'il s'agit de papier ou de copeau si c'est du bois. Déchiqueteuse me semble approprié, mais ce jargon n'engage que moi. Tout ça pour écrire, au bout de six paragraphes, que le Flymo Pac-a-shredder, manufacturé par Husqvarna, est un outil ingénieux, efficace, puissant, et j'ajouterai même huge, awesome, powerful, super, trop fort, waaou. Je vous passe les mortel, glop glop, trop d'la balle, mégakif, warrior etc., c'est fou le nombre d'expressions que l'on peut utiliser pour dire "très bien". Bref, cette machine est une solution pertinente, adaptée et efficace pour débiter des branchages de plusieurs mètres de long et les stocker dans un récipient en plastique d'une soixantaine de litres.

Alors, ce matin, je suis allé à la déchetterie, emportant dans le coffre huit sacs poubelles de cent cinquante litres, emplis de copeaux de bois, d'herbe coupée, de feuilles ratissées, des thuyas du sapin du chêne du merisier du cerisier du tilleul de la vigne vierge et d'autres végétaux dont j'ignore le nom, occupant désormais un espace réduit, ce qui était bien le but de la manoeuvre.

mardi 15 septembre 2009

Pokernet industriel

Il était temps que j'entre dans l'ère moderne du poker. "Quelle ère?" me direz-vous, et je vous répondrai "Celle du poker sur internet." Ce jeu étrange où l'on ne voit pas ses adversaires, où l'on ne sait pas si l'on joue contre un adolescent qui porte une casquette des Yankees, contre un retraité de la Navy qui porte une casquette du Lexington ou contre un yuppie en costume-cravate (c'est bien le seul qui ne porte pas de casquette). A-t-on affaire à un professionnel, à un amateur? Quelle heure est-il chez lui, est-ce son après-midi, son soir, sa nuit? Quelle valeur a pour lui l'argent qu'il joue? Le poker est-il pour lui un loisir comme il va au cinéma ou comme il joue au golf? Est-ce un joueur accroc à la flambe? Est-ce une femme?

Toutes ces questions n'ont pas de réponse. Nos adversaires sont des inconnus. Pas de rapport social avec eux. La discussion sur le tchat' se limite à quelques conventions (nh - nice hand, gg - good game), et le reste du temps le tchat' est un exutoire d'insultes proférées par des joueurs énervés de ne pas avoir gagné comme ils l'avaient imaginé.

Et le poker dans tout cela? Le poker sur internet est un autre jeu. Avec le nombre de mains jouées, il s'ouvre à l'analyse statistique; son support numérique permet la création de bases de données, d'outils logiciels d'aide à l'analyse du jeu; connecté à internet, il est désormais scruté par tous, tout le temps.

Lorsque j'ai commencé à jouer au poker en 2006, j'ai surtout pratiqué à l'Aviation Club de France. En mars 2007, j'ai déposé trois sous sur internet et j'ai commencé à jouer en Pot-Limit Omaha. Le niveau était faible à cette époque, j'ai monté à partir de quelques centaines de dollars quelques milliers de dollars, et j'ai arrêté après avoir testé la procédure de cash-out. En septembre 2007, au hasard d'une nuit de veille de mon second fils, alors nouveau-né, je me suis qualifié pour l'Aruba Poker Classic. Une semaine de vacances pour $309. Voilà ce que représentait pour moi internet : un moyen de se qualifier à des tournois aux buy-in élevé, à l'autre bout du monde. En temps cumulé, j'avais peut-être joué vingt heures en sept mois.

Entretemps, le poker sur internet a changé. Le nombre de joueurs est impressionnant. Certains sont des professionnels du pokernet : ils ont vingt ans, ils jouent vingt heures par jour, et tels les courtiers en bourse du siècle dernier, leur seul objectif est d'être millionnaire avant leurs trente ans. Le niveau de jeu en No-Limit Texas Hold'em a considérablement augmenté : internet c'est l'information; bonne ou mauvaise, vraie ou fausse, elle voyage à la vitesse de la lumière dans une fibre optique. Associations de joueurs, forums de poker, communautés, les joueurs qui ont voulu apprendre ont pu le faire, en sachant lire et trier la myriade d'informations qui leur était offerte.

En décembre 2008, j'ai joué un mois intensif de tournois sur internet. Résultat négatif, non pas que je ne sache pas réaliser de résultats, mais que je ne sache pas tirer parti de mes atouts de joueur de poker averti, et que je ne sache pas m'adapter à cet environnement où le poker est un autre animal à dompter. Et, comme l'on apprend toujours davantage de ses défaites que de ses victoires, j'ai tiré de nombreux enseignements de cet échec, et j'ai fait évoluer mon jeu pour comprendre comment jouer et comment m'adapter sur internet. L'objectif n'est plus de se qualifier pour Aruba ou pour le Main Event des WSOP. Mon objectif est de monter une bankroll à partir de rien - ou disons de pas grand-chose.

Trois dollars, et c'est parti pour le cash-game. Partir des blindes les plus petites, et avancer un pas à la fois. Je suis monté à $30 via des parties aux blindes $0.01-$0.02, me voici désormais aux blindes $0.02-$0.05. Pour l'instant, je joue sans tracker ni hud - les sessions sont courtes et le vivier est trop important pour prendre des notes sur des joueurs réguliers à ces limites; mais cela viendra si je poursuis ma progression.

mercredi 2 septembre 2009

Un de chute à Palm Beach

Résultat décevant lors de la finale du Partouche Poker Tour. J'étais satisfait du tirage de ma place. La classification des styles de mes adversaires a été facile : d'abord trois joueurs serrure - qui vont jouer avec des cartes solides - dont deux pas trop expérimentés; ensuite Pascal Perrault, serrure solide; enfin trois joueurs plus positionnels - c'est à dire plus agressifs en position - dont le jeune québecois Samuel Chartier, qui joue avec la décontraction de sa table finale à l'EPT Barcelone il y a un an (7ème), résultat confirmé par sa victoire à Atlantic City au mois de mars (1er sur un $5000, ça fait $300k tout de même). Alors que, sur le moment, je ne savais pas qui était cet adversaire, j'ai tout de suite ressenti qu'il était expérimenté et prêt à tout pour monter des jetons. Pendant que j'observais, mon image à la table était... celle du mec qui ne joue pas une main.

Puis je suis rentré dans la danse. Je smallball un coup contre Cyril André qui agresse mon bouton depuis le hijack, flop Dame Dame baby, il envoie trois barrels de plus mais le dernier a de la valeur puisqu'il a touché une couleur backdoor avec 75cc. Arrive un nouveau joueur, en retard, dans la zone des serrures (à droite de Pascal Perrault) : c'est Nenad Medic. Il négocie très mal son entrée à la table, d'abord dans le premier coup 4-betté préflop : Samuel Chartier 2-bet, Nenad Medic 3-bet au CO, Cyril André 4-bet à 2050 jetons (second niveau, blindes 50-100), je passe ma BB en sifflotant, Samuel passe, Nenad paie. Le tableau est checké jusqu'au bout, Nenad ouvre 45hh (à sa place j'aurais envoyé la main à la défausse, il ne bat rien), tandis que Cyril André prend le pot avec AK à la hauteur. Second coup, Samuel relance en MP à 250, Nenad relance à 750 au cutoff, Samuel 4-bet à 1750, Nenad paie. Flop AJ5r. Samuel checke, Nenad mise genre 1900, Samuel relance à 4400, Nenad paie. Turn AJ59. Samuel mise 7700, Nenad tank puis paie. River AJ597, Samuel mise un jeton de 5000. Nenad paie assez rapidement, mais muck lorsque Samuel ouvre AJo pour top 2.

Et là, Samuel Chartier a deux fois plus de jetons que les autres joueurs à la table, et va passer la surmultiplée. Il relance neuf mains sur dix préflop, et lorsqu'un joueur agressif ouvre préflop, Samuel 3-bet tout le temps. Et, toutes les fois, Samuel Chartier a remporté le pot préflop, ce qui augmentait le nombre de ses jetons et le confortait dans l'idée qu'il devait continuer sa stratégie. J'ai donc entrepris d'aller chercher des jetons chez lui : sa fréquence de mise impliquait qu'il avait forcément un pourcentage élevé non seulement de bluffs, mais de mains où il mise plusieurs fois avec air, c'est à dire un bluff sans amélioration possible (autant prendre des jetons dans les cas où votre adversaire tire pour pas grand-chose, voire pour rien).

Je limpe UTG avec 22, Samuel relance comme à son habitude, les blindes passent, je paie. Flop J23. Je checke, il cbet demi pot comme d'hab', je paie. Turn J23A, je checke, il barrelle 3/4 de pot, je paie (avec un tempo qui réfléchit et qui laisse penser que je n'ai pas l'As (ce qui est vrai), mais que Samuel ne l'a pas non plus. En tout cas le tableau devient menaçant, ce qui est parfait pour le laisser faire une grosse mise (pour faire peur) à la river. River J23AT, je checke, m'attendant à un gros bet de sa part, mais il mise raisonnablement, je paie mais il ouvre 33 pour la pointure, je muck et je n'exprime qu'un léger mécontentement en claquant mes cartes face cachée sur la table, puis je me lève. Si j'avais joué le coup normalement, je serais déjà dehors en train de parler aux grains de sable, alors tout le reste c'est du bonus et avec 11k jetons, je vais prendre tous les risques pour doubler. Mais le plus gros setup a été pour ma pomme.

Je suis de blinde, Samuel relance à 500 (100-200), je paie en BB avec AKhh. Flop QQ4, je suis devant toute sa range mais je dois faire des jetons. Je checke, avec l'intention d'aller au bout, il mise demi-pot, je paie. Turn QQ42 qui me rajoute un tirage couleur à Coeur. Je checke, il mise encore, et j'ai là le seul coup qui se prête à une réelle analyse de tournoi. Si j'ai des jetons avec de la profondeur, je relance pour prendre le pot tout de suite, et j'ai 15 outs s'il me paie avec une paire en main dans le cas le plus fréquent, soit moins d'un quinzième de sa range . Mais ma situation est différente, je suis désespéré en jetons, et le plan est de payer le bluff à tapis à la river sur any river (à tapis sur hauteur As-Roi donc). Le board est scary, il a les jetons, j'ai une image de wimp, tout est réuni pour que cette image me serve. Ce qui me rend sûr de cette analyse, c'est le fait que Samuel checke en position lorsqu'il a de la showdown value. River QQ246 et je n'ai pas de couleur, je checke parce que la carte est insignifiante, il check behind et ouvre 96o. Je vous l'avais bien dit qu'il checkait pour showdown value. J'ai pris le risque maximum pour faire des jetons et ce n'est pas passé. A tout moment, j'aurais pu relancer et, sauf move aberrant de sa part, j'aurais pris le pot (préflop, flop ou turn), mais j'ai joué pour doubler et lui contester sa position dominante à la table.

Difficile de gagner un tournoi sans gagner un coup :-/

mardi 1 septembre 2009

Spleen au bord de la mer

(Lien ci-dessus vers une chanson d'Isabelle Mayereau)

Peut-on être accroc au spleen? Un lieu, un parfum, un bruit, une ambiance, la madeleine de Proust attend à côté de la tasse de thé. Et quand on aime boire du thé, on s'expose aux souvenirs d'autres temps. Ainsi, je suis passé l'autre jour à Cavalaire. En route pour Cannes, je suis passé voir la maison de mon arrière-grand-père. Dans le centre du village, elle résiste tant bien que mal aux assauts du temps et des transformations de la ville.

Le jardin n'est plus entretenu. L'eucalyptus doit bien faire dix-huit mètres de haut, ses feuilles jonchent le sol poussiéreux du jardin. Il n'y a jamais eu de gazon malgré la nappe phréatique sous le terrain, mais tout pousse très bien malgré le climat méditerranéen (le vent qui souffle à travers la montagne m'a rendu fou). Les poivriers sont également très hauts, et celui qui est à l'avant de la maison est une menace renouvelée sur la rue : une branche s'est brisée et est tombée sur le portillon, et d'autres branches s'immiscent dans les fils électriques (ou du téléphone?) qui courent en haut de poteaux de bois le long de la rue. Les lauriers roses font trois mètres de haut, je les ai connus jeunes massifs; et l'arbre que mon grand-père a planté pendant notre enfance déploie désormais son feuillage en parasol au-dessus des canisses.

Sur les murs extérieurs, le lierre déborde du mur latéral et envahit la toiture. Sur la facade, la bougainvillée, telle une tête d'hydre de Lerne, repousse inlassablement entre la porte et le balcon, et lorsqu'elle est bloquée en haut de la façade par la gouttière, se déploie alors horizontalement, devant les volets de l'étage, autour de la gouttière. Chaque fois que je passe par là, je prends une photo des deux bougainvillées - la maison d'à côté en a également une - qui se disputent chaque saison le concours du plus monstrueux envahisseur à épines - ceux qui ont déjà taillé une bougainvillée compatiront avec moi.

L'intérieur de la maison a vécu. Tout est fonctionnel à l'intérieur, mais la maison n'a que trop peu de visiteurs pour ne pas s'imprégner d'une odeur de renfermé, de poussière, et accueillir parfois quelques moustiques ou quelques fourmis sur la terrasse. Entre autres dégradations, la maison a subi un tag bleu dépourvu de sens sur un mur blanc de chaux, et un volet a été fracturé - tentative abstruse pour espérer voler quelque chose de monnayable, alors qu'il n'y a que des objets de valeur sentimentale d'un autre siècle. Mais les santons, représentant deux vieillards chenus, sont toujours sur la cheminée.

J'ai scié la branche morte du poivrier. Je n'ai pas pu la déplacer, il a fallu que je la recoupe en deux pour pouvoir dégager le portillon. Deux voisines, qui passaient par là, ont partagé avec moi leur désolation de voir cette maison perdre son âme. Mais, ma grand-mère nonagénaire n'y reviendra plus : son sommeil est fragile et le climat froid, chaud et venteux est désormais trop rude pour elle. En outre, revoir cette maison sans la rajeunir déclencherait un crève-coeur, voire une attaque cardiaque.

Moi, je n'ai ressenti que le spleen de voir à l'abandon cet endroit où j'ai passé de nombreuses vacances. Je n'irais pas m'installer là-bas, j'aime trop mes montagnes où je suis désormais installé; et la grouille estivale de la Côte d'Azur me serait sans doute insupportable. Pourtant, j'irais volontiers chercher mes outils et mes gants s'il fallait rajeunir cette maison, pour la rendre à nouveau belle, telle qu'elle est dans mes souvenirs.

samedi 22 août 2009

Collier de barbe

Tous les adolescents - au sens latin du terme, c'est à dire les jeunes mâles entre treize et trente ans - se posent fréquemment la question de savoir comment agencer les poils qui leur poussent un peu partout sur le visage. La moustache prépubère, le bouc de jeune loup, la barbe de trois jours quatre fois par semaine, la palette a de nombreuses nuances.

Or de toutes les grandes vérités humaines, il y en a une qui m'est apparue assez rapidement : se raser tous les matins est une corvée. "All the best people shave twice a day", disait ce vieux beau d'Humbert Humbert, comme quoi on fait dire n'importe quoi aux personnages de roman pour impressionner une midinette écervelée.

Le collier de barbe désigne un port de barbe continue, d'une patte à l'autre en passant par le menton, sans moustache. Il existe de multiples possibilités de tailler un collier de barbe : on peut choisir la largeur de la taille sur les joues, sur le menton, sur le cou, et faire varier l'épaisseur de la barbe, courte, drue, bouclée, longue, etc.

Malgré ces possibilités et autant de visages différents, l'image du collier de barbe est solidement ancrée dans l'esprit français contemporain à celle, non pas d'Epinal, mais de Robert Hue, et le lien évident entre le collier de barbe et être un homme de gauche devient la première sottise que vous entendez de vos proches lorsqu'ils veulent vous dire "tiens, tu portes un collier de barbe", avec un sous-entendu à peine dissimulé : "mais tu comptes le garder???"

Ma foi oui, j'ai testé ces dernières semaines, et je suis satisfait de la taille de ma barbe. Les joues sont dégagées. La barbe est taillée en brosse afin d'assurer la continuité avec mes cheveux courts, et au fur et à mesure, le poil devient plus souple avant d'être passé à la tondeuse, comme un cheveu. La bouche est complètement dégagée, pas de moustache. Je n'ai jamais porté la moustache : pour trois moustaches dans le monde, il n'y a qu'un Tom Selleck pour un Michel Blanc et un Gérard Jugnot, et je suis né trop loin de Hawaii. La barbe est taillée selon le contour de la mâchoire, comment vous dire? Comme un casque de moto-cross, mais en un peu plus fin. Le cou est dégagé, parce que la barbe dans le cou me pique lorsqu'elle est courte, et me gratte lorsqu'elle est longue, et je n'ai pas vocation à porter une barbe longue bouclée, parce que ma barbe ne boucle pas naturellement.

En outre, la plupart des barbus à longue barbe la portent par adhésion avec une communauté religieuse : musulmans, juifs, orthodoxes, amish, mormons, et la liste n'est pas du tout exhaustive. Mais trêve de digression, retour à la capilliculture.

Alors, pour vous proposer d'autres images, toujours pas d'Epinal, mais de barbus au collier de barbe, je vous propose :

Le regard sévère d'Abraham Lincoln, dont la légende dit qu'une petite fille lui aurait conseillé de se laisser pousser la barbe pour paraître moins austère (sic) pour sa candidature présidentielle. Parfois, on peut se demander si cet avocat républicain, aux idées humanistes et généreuses, était capable d'éclater de rire de façon spontanée.


Le regard joyeux et débonnaire du nain Prof. Révisez vos classiques : sur sept nains, il y en a un chauve et imberbe (Simplet), et les six autres portent un collier de barbe, trois dans une variante longue (Grincheux, Timide et Dormeur), et trois dans une variante plus courte (Joyeux, Atchoum et Prof).



Gilbert Lefranc portait un collier de barbe fin au début de son service militaire. Cette photo me permet d'illustrer la coupe en casque de moto-cross à travers le charisme d'un jeune homme à la barbe fine qui, selon son propre témoignage, souhaitait se donner un air plus âgé qu'en réalité. On me signale en revanche que David Duchovny n'a, quant à lui, jamais porté le collier de barbe.


Alain Delon n'a pas, lui non plus, porté le collier de barbe, mais dans son cas on peut dire qu'il a bien fait. D'aucuns doivent rester glabres pour aspirer à la beauté, tandis que Serge Gainsbourg pouvait se permettre de se raser avec un rasoir spécial pour porter la barbe de trois jours, tous les jours. Comme quoi il n'y a pas de corrélation entre la beauté et le talent : tous deux ont connu le succès de l'artiste et le succès auprès des femmes. Je dis ça parce que, comme disait Coluche, moi ça m'arrange.

Le personnage Philip Mortimer, qui a su faire oublier qu'il est roux et anglais en ajoutant deux accessoires indispensables à son camouflage : le collier de barbe et la pipe. On retrouve un élément déterminant dans le choix du collier de barbe chez l'adolescent : donner de soi une image virile.


Enfin, le personnage de Gilbert Sedman, interprété par Bruno Moynot dans le film Les Bronzés font du ski, me permet de boucler sur l'image, d'Epinal cette fois, du goûtu* : il porte un collier de barbe, il fume la pipe, il porte des lunettes, il vote à gauche.


* goûtu, adj. : qui porte un collier de barbe. Citation : "C'est goûtu, ça a du retour." (Gilbert Sedman, savourant un tord-boyaux artisanal dans une ferme des alpages des Bronzés font du ski).

En conclusion, le collier de barbe porte sans doute très mal son nom, puisqu'il n'est pas vraiment autour du cou. Là où le collier de perles met en valeur la femme, le collier de barbe aide parfois à se sentir plus homme. Mais je vous en prie, arrêtez d'associer le collier de barbe avec : la pipe, les lunettes, le prof gauchiste, l'artiste syndiqué, le vieux chauve, etc.

Quant à moi, je n'irai pas me raser.

lundi 17 août 2009

Le meilleur tournoi de l'année : Finale Partouche, Cannes 2009

Tournoi principal du Partouche Poker Tour. Day 1A lundi 31 août, day 1B 1er septembre. Buy-in 7750€+750€. Le meilleur tournoi de l'année. Une structure lente, permettant de développer un jeu de cash game full-ring, deepstack, sur la première journée et si tout va bien sur la seconde. Un champ composé d'une minorité de joueurs professionnels ou compétents, et d'une majorité de joueurs qui ont chatté leur ticket au cours des super satellites à structure turbo, ce qui représente beaucoup d'argent mort. Toutes ces raisons font de ce tournoi le meilleur investissement de l'année, au point de mériter un buy-in direct.

C'est un investissement hors bankroll. Il faut une année de satellites dans quarante casinos pour constituer cette cagnotte. J'accepte l'investissement élevé, la variance élevée liée à la rareté d'un tel événement, parce que le jeu en vaut la chandelle. Faire un bon résultat dans ce tournoi permet de décrocher la timbale.

A buy-in équivalent, je n'irais pas investir treize mercredis soirs au 500€ deepstack turbo de l'ACF. Un tournoi qui se résume à une demi-heure de cartes au niveau 200-400/50, là on peut parler d'edge réduit au chattage de board avec KJs contre ATo : attendre de meilleures cartes serait catastrophique.

Pour en revenir à Cannes, ce sera jeu smallball, value, position, loose passif préflop (2-bet first in, mais call en multiway pour stacker postflop), stack agressif postflop, monter du stack avec une image de déglingo, et enfin valoriser le jeu longball quand on a du tapis, je remercie d'avance Gus Hansen pour la publication de son ouvrage "comment écailler et vider les poissons de l'hémisphère Sud", riche d'enseignements pour peu que l'on sache lire entre les lignes.

lundi 3 août 2009

./ddrescue --status : Still running...

Je sais, le paramètre --status n'existe pas. Quoi qu'il en soit, j'ai une vieille bécane sous Linux (Suse ES9, x86 à 533 millions de fois par seconde) qui mouline depuis mi-juillet pour reconstruire un disque. J'ai perdu un peu de temps en faisant un premier passage sur le disque dur à base de blocs de 256Mo, sans split en cas d'erreur, un coup pour rien j'avais récupéré 1% du disque dur et planté le log à cause des tailles légèrement différentes entre la source et la cible.

Alors, j'ai sizé raisonnablement pour faire de nouveau un premier passage, toujours sans split, avec l'option "dès que tu trouves un bloc bon tu me l'écris de l'autre côté". Depuis le 20 juillet, la commande tourne.

#>./ddrescue -n -b 256Ki -c 1 -s 121Gi /dev/hdc /dev/hdb 20090720.log

Au 3 août, soit 14 jours plus tard, j'en suis à 27Go récupérés, 6Go à repasser avec une taille de bloc plus petite, et encore quelques 88Go à mouliner. Je suppose que j'écrirai une petite mise à jour fin août, et une autre fin septembre. Tout ça pour 16708 cylindres en train de se démagnétiser. Promis, dès que c'est fini, je grave une dizaine de DVDs pour archiver ce qui doit l'être, et éviter de devoir recomposer neuf années de photos numériques éparpillées sur n bécanes et p CDs (à l'époque on gravait des CDs) photo par photo.

lundi 13 juillet 2009

Rétroclassement des mains de départ au Hold'em

Tous les joueurs de poker savent que la paire d'As est la main de départ la plus forte du Texas Hold'em. Savoir quelle est la main la plus faible est déjà source de controverses, puisque 32o et 72o se disputent la place de la lanterne rouge. Quant à établir quelle est la deuxième meilleure main du jeu, ou réaliser une classification complète des mains de départ, il s'agit de bien préciser ce qu'on mesure pour établir la classification.

La seconde meilleure main? KK chez la plupart des auteurs, mais Chen et Ankenman insistent sur le fait de posséder un As en main afin de réduire la probabilité d'occurrence d'une paire d'As derrière soi. AKs serait alors la deuxième meilleure main? Non, répondent les auteurs de Mathematics of poker, car ATs se comporte mieux que AKs contre AA. Ces considérations, issues d'un problème de heads-up où il faut pousser plus de 800BB pour gagner 1BB ou être payé par les As, n'ont à peu près aucun intérêt, puisqu'aucune application pratique de ces résultats ne peut être utilisée dans le jeu réel.

Prenons les 169 classes de main de départ du Texas Hold'em, AA-22, AKs-32s, AKo-32o. Si on considère le range des 169 classes de mains (appelons-le R169), on peut ordonner le résultat de chaque main contre R169. La plus mauvaise main contre R169 est 32o, qui a 32,3% d'équité. C'est donc la première main que l'on va passer. Considérons maintenant R168, le range restant, toutes les mains sauf 32o qu'on a passé. On recalcule l'équité de toutes les mains de R168 contre R168, on déduit la 168ème main, et on reprend les calculs avec R167, etc. jusqu'à avoir réalisé un classement complet.

Tout l'intérêt de ce classement est de bien comprendre ce qui se passe dans la zone des bonnes mains, catégorie "pas premium mais bien mieux que marginale", et de faire la différence sur la manière de jouer ces mains.

Voici le début du tableau de rétroclassement, pour les meilleures mains. Colonne de gauche, votre main de départ. En ligne, les mêmes mains de départ, dont l'effectif se cumule pour former un range adverse. Ainsi, ligne 4, à l'intersection de la ligne QQ et de la colonne TT, vous lisez 0,524, ce qui représente l'espérance de gain de votre main (QQ) contre le range adverse {AA KK AKs QQ AKo JJ TT}. Ne vous formalisez pas sur l'écriture "AAo", dans un jeu de 52 cartes normal, une paire est toujours dépareillée.



Ci-dessous, le tableau de la variance associée. Le calcul a été réalisé par la formule de König-Huygens appliquée au cas discret.



Qu'y a-t-il à observer dans ces tableaux? Tout d'abord, que lorsqu'une main est classée dernière du range résiduel considéré, son espérance est d'environ 1 contre 2. Par exemple, AQo a 0,356 d'équité face à R10={99+ AQs+ AQo+}. Ces cases sont celles en vert sur le graphique, elles représentent la grande diagonale du tableau. On peut également observer à partir de quel range une main obtient une espérance supérieure à 0,500; par exemple AKo devient rentable à partir de R13={88+ AJs+ AQo+ KQs}.

J'ai encore deux ou trois observations à faire sur le tableau des variances, avant d'écrire une conclusion de cette analyse. A suivre...

samedi 11 juillet 2009

No Limit Texas Hold'em : la menace All-in préflop n'a pas tué le jeu.

Le théoricien renommé du poker David Sklansky avait analysé il y a quelques dizaines d'années qu'un amateur pouvait contraindre un professionnel à renoncer à son bagage technique, à son expérience du jeu et ainsi à son avantage, en jouant une stratégie simple mais terriblement efficace : préflop, passer ou faire tapis. En fait, l'expérience montre que cette stratégie est tout sauf une menace.

A l'époque, les arguments de Sklansky s'appuyaient sur les exemples suivants :
- un amateur propose à un pro un pari à 2 contre 1, un tête-à-tête où l'amateur fait tapis dans le noir à chaque main. Comme peu de mains au hold'em sont favorites à 2 contre 1 contre une main aléatoire, le pro doit abandonner ses blindes avant de toucher une bonne main, ce qui accroît le déséquilibre en faveur de l'amateur;
- une néophyte totale pourrait faire son chemin au main event des WSOP en jouant une stratégie tapis préflop, grâce à la faible fréquence de présence des As chez l'un des pros de sa table.

Le premier exemple est valable : trop peu de mains au Hold'em ont un avantage sur les autres - et la paire d'As est bien plus rare qu'elle n'est puissante. L'erreur du pro est qu'il ne faut pas faire un pari à 2 contre 1 dans ce cas de figure.

Le second exemple était valable lorsque le champ du main event des WSOP était constitué d'une centaine de joueurs, et que le but premier était la survie. Mais depuis 2004, la taille croissante du champ contraint les joueurs qui veulent avancer à aller chercher les jetons adverses, au prix de risques d'élimination supplémentaires en début de tournoi. Un pro n'attendra plus d'avoir les As pour payer votre tapis. Il attendra une main décente et, parfois, il n'attendra même pas que votre tapis ne soit plus une menace pour le sien.

Alors, est-ce que Sklansky s'est fourvoyé, ou bien est-ce que la situation pro/amateur a changé? Probablement les deux! Jouer smallball reste une stratégie vertueuse, faire progresser son tapis de façon linéaire, sans risques, est louable. Mais nul ne peut se passer de doubler à un moment ou à un autre. Jouer longball, faire progresser son tapis de façon exponentielle, fait partie intégrante de la structure no-limit.

Le poker est un jeu où les meilleurs savent réagir et s'adapter. De ce point de vue, la menace du scénario de Sklansky est restée un problème théorique, mais auquel tous les pros ont rapidement trouvé une parade pragmatique.

jeudi 9 juillet 2009

dd, testdisk et photorec

Il est possible que tous les amateurs d'informatique aient une certaine nostalgie des temps anciens qu'ils ont connu. Comme votre temps heureux de l'informatique n'est peut-être pas le même que celui de votre voisin, choisissez le vôtre :
- un temps où les ordinateurs étaient constitués d'ampoules et de cartes perforées;
- un temps où les lecteurs de disquettes engloutissaient des crêpes;
- un temps où les disques durs étaient plus imposants qu'une cloche à fromage;
- un temps où 128ko de mémoire étaient un luxe pour le développeur qui pouvait programmer en mémoire écran en jouant sur le codage nombre de couleurs * résolution (en 4 couleurs tu faisais du asciiart, en 16 couleurs tu devenais infographiste);
- un temps où les premiers jeux graphiques sont apparus en force (Apple II, C64, Amstrad 6128), devançant les rudimentaires consoles de jeux de l'époque;
- un temps où le clavier et le mode texte dépassaient en efficacité toutes les fenêtres et toutes les souris.

Il aura fallu pas mal de tâtonnements et d'évolutions pour que l'amateur averti retrouve le goût de machines évoluées pratiques et efficaces, avec l'avènement du mobile tactile, de l'économie de moyens, du retour de la miniaturisation et de l'optimisation (espace, énergie, temps). Je devrais peut-être devenir développeur sur iPhone, fermez la parenthèse.

Mais il est parfois besoin de revenir aux sources de l'informatique pour résoudre des problèmes que la technologie moderne ne sait plus traiter, par paresse sans doute. Ainsi, un problème sur un disque dur, de type démagnétisation, erreurs CRC, est l'un des plus graves - enfin tout est relatif - qui soit, puisqu'il peut conduire à une perte de données. Dans l'informatique d'entreprise ou de l'industrie, des solutions coûteuses et complexes existent, mais pour un particulier, avoir une solution efficace sans utiliser d'usine à gaz est plus difficile à obtenir.

Il y a dix jours, j'ai eu ainsi un problème sur une partition d'un disque dur. Puis-je récupérer les données qu'il y a sur la partition endommagée, et si oui, comment, et quid en outre des autres partitions logiques sur le même disque dur? On peut faire tout ça, à condition d'avoir recours à de vieux outils qui manipulent les couches les plus basses des disques durs informatiques.

Oldie but goldie : dd.

Newbie but crafty : testdisk (de cgsecurity), et son complément qui vous sera peut-être utile, photorec (même éditeur).

Il faut savoir revenir aux sources.

Addendum : je suis en train de tester ddrescue (à ne pas confondre avec dd_rescue), qui offre quelques possibilités sympathiques, et ça tombe bien mon disque dur a besoin de compassion. Quand je pense que j'ai travaillé pendant neuf ans dans le monde du stockage et des disques durs... ça me rappelle les installations de configs avec sa bi*e et son couteau, comme le répétait souvent un collègue des Professional Services. Pour l'anecdote, il avait un excellent couteau multi-fonctions. Test de la version 1.11 de ddrescue du 11 juillet 2009.

samedi 27 juin 2009

Finale nationale du Joa Royale Poker Tour

(Liens vidéos http://www.joa-online.com/Videos/, cliquez ci-dessus)

Dix joueurs invités à Antibes, au casino de La Siesta, pour disputer la finale du Joa Royale Poker Tour. La répartition des prix favorisait la prise de risques, car la victoire était primée à cent mille euros, en plus d'un séjour offert au tournoi principal des WSOP 2010 - c'est à dire dans un an. Tous les joueurs invités étaient primés, quelle que soit leur place à cette table finale.

Pendant la journée, j'avais besoin de me détacher de toute pression, et d'éloigner mes pensées du poker. J'ai passé la journée au centre nautique à deux pas de La Siesta : toboggans, piscines, bouées, gestion de l'adrénaline en bateau gonflable sur des pentes de grand huit, en compagnie de cinq quadras d'ovs qui démontraient que les gamineries n'avaient rien à voir avec le nombre des années. Opération réussie, j'étais fatigué juste ce qu'il faut, l'esprit zen et concentré pendant le tournoi. J'ai du quand même gérer le soir quelques bleus et un coup de soleil sur le ventre - quand on glisse sur le dos sur des toboggans à ciel ouvert...

J'avais prévu pour le tournoi une stratégie assez simple, puisque la structure du tournoi, avec des augmentations rapides des blindes, et un gong au bout de quatre heures, ne permettait pas de développer un jeu trop subtil. Phase zéro, celle où l'on joue l'observation. Phase un, celle où l'on joue ses adversaires, pour leur prendre des petits pots et progresser doucement. Phase deux, celle où l'on joue ses cartes pour éliminer les petits tapis. Phase trois, celle où l'on joue les jetons pour augmenter son tapis et aller chercher la victoire.

La phase zéro a duré vingt minutes. Un joueur a marqué son empreinte (relances, bluffs) sur la table, et deux joueurs ont réagi en ajustant leur jeu. Tous les autres joueurs de la table (moi compris) ont continué d'attendre des cartes agréables.

La phase un a duré une heure quarante. Aucune élimination à mi-parcours, mais des tapis ont été érodés, et le mien fait partie de ceux qui sont plus épais, tout va bien.

La phase deux a duré une heure. Malheureusement, les cartes ne m'ont pas été favorables : j'ai une première confrontation contre un petit tapis avec AK contre AJ, mais le coup est partagé. Puis, toujours contre un petit tapis, je perds avec 22 contre K8. Enfin, devenu moi-même petit tapis, je perds avec A8 contre K9. Tous ces coups ont été joués à tapis préflop. Pendant cette phase, les éliminations se sont succédées pour six des dix joueurs.

La phase trois a duré une heure. Les quatre joueurs restants n'étaient bientôt plus que trois, mais le futur gagnant a mis en pratique la stratégie que je vous ai décrite, ce qui lui a permis de terminer avec le plus gros tapis au gong des quatre heures de jeu et de remporter l'édition 2009 du Joa Royale Poker Tour. Bien joué, félicitations pour cette victoire!

Comment expliquer que je suis satisfait de mon tournoi malgré une élimination prématurée (à la neuvième place)? Tout d'abord parce que j'ai joué dans des conditions optimales : état d'esprit, relaxation, perception des forces et des faiblesses des adversaires, et une bonne compréhension des dynamiques de jeu à la table. La stratégie mise en place était bonne (la bonne, devrais-je dire, il n'y en avait pas d'autre pour jouer la victoire), mais nul ne peut gagner un tournoi sans survivre à la phase où les cartes doivent être un minimum de votre côté.

dimanche 14 juin 2009

En route pour la finale du Joa Poker Tour

Taamer aura bataillé pendant six heures et demie de jeu en deux jours pour obtenir sa place en finale du Joa Poker Tour, qui aura lieu au casino Joa La Siesta à Antibes le 27 juin 2009.

Le samedi, trois tables (7, 6 et 6 joueurs) indépendantes, trois joueurs à éliminer par table. Sur la table à sept joueurs, Taamer est confronté à deux joueurs d'Uriage et quatre joueurs d'Antibes. Après un coup mal joué en début de partie, Taamer a 850 jetons (sur les 3000 initiaux) au deuxième niveau de blindes (50-100), une catastrophe! S'armant de patience pour ne pas miser son tapis avec une main marginale, Taamer attend dans sa coquille et se voit exaucé au début du niveau 75-150, où il double en grosse blinde grâce aux As, et reprend de l'air (et des jetons) pour bien gérer sa partie. Il faudra tout de même trois heures et demie de jeu pour garder quatre joueurs à la table pour la partie du dimanche.

Le dimanche, deux tables (5 joueurs chacune) indépendantes, trois joueurs à éliminer par table. Le hasard du tirage au sort place les quatre qualifiés de la table de la veille sur la même table le dimanche - les positions relatives sont toutefois inversées. C'est de nouveau une partie à couteaux tirés qui a lieu, et il faudra un peu plus de trois heures pour atteindre la dernière élimination, synonyme de qualification pour les deux joueurs restants.

Deux joueurs d'Antibes et deux joueurs d'Uriage iront ainsi, avec six autres joueurs issus d'autres demi-finales régionales, en finale du Joa Poker Tour.

jeudi 7 mai 2009

World Poker Tour à Venise

Taamer et Vieto seront dans quelques jours à Venise, étape européenne de fin de saison du 7ème circuit américain World Poker Tour. Vieto, dans la continuité de ses bons résultats, va participer au tournoi principal du WPT (day 1B jeudi 7 mai), tandis que Taamer rejoindra les rangs des joueurs de poker au Casino di Venezia, où se déroule l'événement.

Arrivés sur place, nous rejoignons notre penzione qui s'avère excellente, tant pour le confort que pour sa situation, à deux pas du Casino. Mercredi soir, Vieto se repose, et Taamer se rend au casino. Soirée fructueuse et découverte du style de jeu italien, qui n'est pas sans rappeler les premiers temps du poker dans les casinos français il y a deux ans et demi.

Jeudi, Vieto est fin prêt pour démarrer le tournoi. Taamer joue un temps les touristes en salle de tournoi, puis une fois le tournoi lancé, rejoint la salle de poker du casino.


Interview de Patrick Bruel, Taamer joue les badauds




Vieto, concentré dès le début du tournoi.



Les jetons de poker du casino di Venezia sont ceux des jeux traditionnels : dénominations, couleurs, tailles et épaisseurs différentes ne facilitent pas la construction de château.

lundi 13 avril 2009

Visite à San Remo

J'ai testé le casino de San Remo, une semaine avant le festival du circuit de tournois organisé par PokerStars, l'European Poker Tour. Le mois d'avril voit en effet deux tournois étapes de l'EPT se disputer l'un après l'autre à peu de distance : San Remo et Monte-Carlo.

Les objectifs étaient variés : découvrir la ville et le casino, essayer de se qualifier pour l'EPT de San Remo à peu de frais, et évaluer les tables de cash game du casino de San Remo, avant l'arrivée des jeunes loups de PokerStars la semaine suivante.

Au final, un séjour de deux jours complets, deux sessions fructueuses de cash game au Casino, une tentative infructueuse de remporter une place via satellite, et l'idée que les grands casinos italiens (bien moins nombreux que les casinos en France) ont désormais eux aussi une clientèle régulière qui joue au poker, souvent à des tables chères (blindes 5-10 tapis mini 300 pas de maxi), et parfois pas très bien. Il faut savoir que l'Italie est encore bridée pour l'accès aux sites de poker sur internet, et que pokerstars.it vient tout juste d'être autorisé.

Tout comme Monte Carlo en avril 2008, ou comme Namur en novembre 2008, l'expérience de San Remo 2009 est à renouveler.