lundi 13 juillet 2009

Rétroclassement des mains de départ au Hold'em

Tous les joueurs de poker savent que la paire d'As est la main de départ la plus forte du Texas Hold'em. Savoir quelle est la main la plus faible est déjà source de controverses, puisque 32o et 72o se disputent la place de la lanterne rouge. Quant à établir quelle est la deuxième meilleure main du jeu, ou réaliser une classification complète des mains de départ, il s'agit de bien préciser ce qu'on mesure pour établir la classification.

La seconde meilleure main? KK chez la plupart des auteurs, mais Chen et Ankenman insistent sur le fait de posséder un As en main afin de réduire la probabilité d'occurrence d'une paire d'As derrière soi. AKs serait alors la deuxième meilleure main? Non, répondent les auteurs de Mathematics of poker, car ATs se comporte mieux que AKs contre AA. Ces considérations, issues d'un problème de heads-up où il faut pousser plus de 800BB pour gagner 1BB ou être payé par les As, n'ont à peu près aucun intérêt, puisqu'aucune application pratique de ces résultats ne peut être utilisée dans le jeu réel.

Prenons les 169 classes de main de départ du Texas Hold'em, AA-22, AKs-32s, AKo-32o. Si on considère le range des 169 classes de mains (appelons-le R169), on peut ordonner le résultat de chaque main contre R169. La plus mauvaise main contre R169 est 32o, qui a 32,3% d'équité. C'est donc la première main que l'on va passer. Considérons maintenant R168, le range restant, toutes les mains sauf 32o qu'on a passé. On recalcule l'équité de toutes les mains de R168 contre R168, on déduit la 168ème main, et on reprend les calculs avec R167, etc. jusqu'à avoir réalisé un classement complet.

Tout l'intérêt de ce classement est de bien comprendre ce qui se passe dans la zone des bonnes mains, catégorie "pas premium mais bien mieux que marginale", et de faire la différence sur la manière de jouer ces mains.

Voici le début du tableau de rétroclassement, pour les meilleures mains. Colonne de gauche, votre main de départ. En ligne, les mêmes mains de départ, dont l'effectif se cumule pour former un range adverse. Ainsi, ligne 4, à l'intersection de la ligne QQ et de la colonne TT, vous lisez 0,524, ce qui représente l'espérance de gain de votre main (QQ) contre le range adverse {AA KK AKs QQ AKo JJ TT}. Ne vous formalisez pas sur l'écriture "AAo", dans un jeu de 52 cartes normal, une paire est toujours dépareillée.



Ci-dessous, le tableau de la variance associée. Le calcul a été réalisé par la formule de König-Huygens appliquée au cas discret.



Qu'y a-t-il à observer dans ces tableaux? Tout d'abord, que lorsqu'une main est classée dernière du range résiduel considéré, son espérance est d'environ 1 contre 2. Par exemple, AQo a 0,356 d'équité face à R10={99+ AQs+ AQo+}. Ces cases sont celles en vert sur le graphique, elles représentent la grande diagonale du tableau. On peut également observer à partir de quel range une main obtient une espérance supérieure à 0,500; par exemple AKo devient rentable à partir de R13={88+ AJs+ AQo+ KQs}.

J'ai encore deux ou trois observations à faire sur le tableau des variances, avant d'écrire une conclusion de cette analyse. A suivre...

samedi 11 juillet 2009

No Limit Texas Hold'em : la menace All-in préflop n'a pas tué le jeu.

Le théoricien renommé du poker David Sklansky avait analysé il y a quelques dizaines d'années qu'un amateur pouvait contraindre un professionnel à renoncer à son bagage technique, à son expérience du jeu et ainsi à son avantage, en jouant une stratégie simple mais terriblement efficace : préflop, passer ou faire tapis. En fait, l'expérience montre que cette stratégie est tout sauf une menace.

A l'époque, les arguments de Sklansky s'appuyaient sur les exemples suivants :
- un amateur propose à un pro un pari à 2 contre 1, un tête-à-tête où l'amateur fait tapis dans le noir à chaque main. Comme peu de mains au hold'em sont favorites à 2 contre 1 contre une main aléatoire, le pro doit abandonner ses blindes avant de toucher une bonne main, ce qui accroît le déséquilibre en faveur de l'amateur;
- une néophyte totale pourrait faire son chemin au main event des WSOP en jouant une stratégie tapis préflop, grâce à la faible fréquence de présence des As chez l'un des pros de sa table.

Le premier exemple est valable : trop peu de mains au Hold'em ont un avantage sur les autres - et la paire d'As est bien plus rare qu'elle n'est puissante. L'erreur du pro est qu'il ne faut pas faire un pari à 2 contre 1 dans ce cas de figure.

Le second exemple était valable lorsque le champ du main event des WSOP était constitué d'une centaine de joueurs, et que le but premier était la survie. Mais depuis 2004, la taille croissante du champ contraint les joueurs qui veulent avancer à aller chercher les jetons adverses, au prix de risques d'élimination supplémentaires en début de tournoi. Un pro n'attendra plus d'avoir les As pour payer votre tapis. Il attendra une main décente et, parfois, il n'attendra même pas que votre tapis ne soit plus une menace pour le sien.

Alors, est-ce que Sklansky s'est fourvoyé, ou bien est-ce que la situation pro/amateur a changé? Probablement les deux! Jouer smallball reste une stratégie vertueuse, faire progresser son tapis de façon linéaire, sans risques, est louable. Mais nul ne peut se passer de doubler à un moment ou à un autre. Jouer longball, faire progresser son tapis de façon exponentielle, fait partie intégrante de la structure no-limit.

Le poker est un jeu où les meilleurs savent réagir et s'adapter. De ce point de vue, la menace du scénario de Sklansky est restée un problème théorique, mais auquel tous les pros ont rapidement trouvé une parade pragmatique.

jeudi 9 juillet 2009

dd, testdisk et photorec

Il est possible que tous les amateurs d'informatique aient une certaine nostalgie des temps anciens qu'ils ont connu. Comme votre temps heureux de l'informatique n'est peut-être pas le même que celui de votre voisin, choisissez le vôtre :
- un temps où les ordinateurs étaient constitués d'ampoules et de cartes perforées;
- un temps où les lecteurs de disquettes engloutissaient des crêpes;
- un temps où les disques durs étaient plus imposants qu'une cloche à fromage;
- un temps où 128ko de mémoire étaient un luxe pour le développeur qui pouvait programmer en mémoire écran en jouant sur le codage nombre de couleurs * résolution (en 4 couleurs tu faisais du asciiart, en 16 couleurs tu devenais infographiste);
- un temps où les premiers jeux graphiques sont apparus en force (Apple II, C64, Amstrad 6128), devançant les rudimentaires consoles de jeux de l'époque;
- un temps où le clavier et le mode texte dépassaient en efficacité toutes les fenêtres et toutes les souris.

Il aura fallu pas mal de tâtonnements et d'évolutions pour que l'amateur averti retrouve le goût de machines évoluées pratiques et efficaces, avec l'avènement du mobile tactile, de l'économie de moyens, du retour de la miniaturisation et de l'optimisation (espace, énergie, temps). Je devrais peut-être devenir développeur sur iPhone, fermez la parenthèse.

Mais il est parfois besoin de revenir aux sources de l'informatique pour résoudre des problèmes que la technologie moderne ne sait plus traiter, par paresse sans doute. Ainsi, un problème sur un disque dur, de type démagnétisation, erreurs CRC, est l'un des plus graves - enfin tout est relatif - qui soit, puisqu'il peut conduire à une perte de données. Dans l'informatique d'entreprise ou de l'industrie, des solutions coûteuses et complexes existent, mais pour un particulier, avoir une solution efficace sans utiliser d'usine à gaz est plus difficile à obtenir.

Il y a dix jours, j'ai eu ainsi un problème sur une partition d'un disque dur. Puis-je récupérer les données qu'il y a sur la partition endommagée, et si oui, comment, et quid en outre des autres partitions logiques sur le même disque dur? On peut faire tout ça, à condition d'avoir recours à de vieux outils qui manipulent les couches les plus basses des disques durs informatiques.

Oldie but goldie : dd.

Newbie but crafty : testdisk (de cgsecurity), et son complément qui vous sera peut-être utile, photorec (même éditeur).

Il faut savoir revenir aux sources.

Addendum : je suis en train de tester ddrescue (à ne pas confondre avec dd_rescue), qui offre quelques possibilités sympathiques, et ça tombe bien mon disque dur a besoin de compassion. Quand je pense que j'ai travaillé pendant neuf ans dans le monde du stockage et des disques durs... ça me rappelle les installations de configs avec sa bi*e et son couteau, comme le répétait souvent un collègue des Professional Services. Pour l'anecdote, il avait un excellent couteau multi-fonctions. Test de la version 1.11 de ddrescue du 11 juillet 2009.